L’action collective permet à une personne qui est membre d’un groupe de personnes qui se trouvent dans une situation similaire à la sienne d’intenter une action en justice pour le compte de tout le groupe, sans avoir à obtenir l’autorisation de chacun des membres.
L’action collective favorise l’accès à la justice. Elle permet à plusieurs personnes d’unir leurs forces pour s’opposer à une autre partie généralement plus forte d’un point de vue économique ou commercial. L’action collective permet ainsi de rééquilibrer le rapport de force inégal qui peut exister entre les parties. Elle supprime également tout risque économique pour les membres puisqu’ils n’ont aucun frais à assumer en lien avec les procédures judiciaires, sauf un pourcentage de leur indemnité advenant un gain.
La procédure d’action collective et ses avantages
L’action collective est le moyen de procédure qui permet à une personne d’intenter une action en justice sans mandat, pour le compte de toutes les autres personnes dans une situation similaire.
La procédure d’action collective s’exerce généralement en trois étapes distinctes:
1) l’autorisation d’une action collective;
2) le mérite; et
3) le recouvrement.
Une entente de règlement à l’amiable peut survenir au cours de l’une ou l’autre des deux premières étapes.
I. L’autorisation d’une action collective
Un membre d’un groupe ne peut exercer une action collective qu’avec l’autorisation du tribunal, obtenue dans le cadre de l’audition d’une Demande pour autorisation d’exercer une action collective.
Cette étape, préalable à l’exercice du recours lui-même, est en fait un processus de filtrage qui permet au tribunal de s’assurer que l’action collective envisagée répond à des critères bien établis.
Ainsi, le tribunal doit s’assurer que:
- les recours des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes;
- les faits allégués à la Demande pour autorisation d’exercer une action collective paraissent justifier les conclusions recherchées;
- la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l’application de la procédure de jonction de parties ou la possibilité pour un mandataire d’ester en justice pour le compte d’un groupe; et
- le membre auquel le tribunal entend attribuer le statut de représentant est en mesure d’assurer une représentation adéquate des membres du groupe.
Ce processus de filtrage est nécessaire puisqu’une fois le statut de représentant attribué au demandeur, ce dernier devient en quelque sorte leur porte-parole et est investi du devoir de conduire l’action collective pour le compte des membres d’un groupe qui, dans les faits, n’ont rien demandé au tribunal.
Une fois l’exercice de l’action collective autorisée, des avis en informant les membres du groupe doivent être diffusés. Ces avis indiquent notamment la description du groupe pour lequel l’exercice de l’action collective a été autorisée, les conclusions recherchées dans le cadre de l’action collective ainsi que les formalités à remplir pour qu’un membre puisse s’exclure du groupe.
En effet, nul n’est tenu de participer à une action collective et il est possible de s’en exclure au cours des jours qui suivent la diffusion des avis. Toutefois, à défaut de s’exclure d’une action collective, un membre du groupe est réputé en faire partie et sera lié par les conclusions, positives ou négatives, d’un éventuel jugement survenu à l’étape du mérite.
II. Le mérite
On appelle « mérite » l’étape lors de laquelle le tribunal est appelé à trancher le fond de l’action collective. Il s’agit en fait d’une étape propre à tout processus judiciaire qui prévoit notamment l’échange de procédures et de pièces, et qui conduit au procès et en bout de piste à un jugement final.
Un avis doit être diffusé de manière à informer les membres du groupe de la teneur du jugement final. En cas de victoire, l’avis indique également la procédure que doivent suivre les membres pour recouvrer les sommes auxquelles ils ont droit.
III. Le recouvrement
Lorsque la preuve présentée au tribunal le permet, le jugement final ordonne un recouvrement collectif, c’est-à-dire que le tribunal ordonne à la partie condamnée de payer un montant global représentant la somme des dommages subis par la totalité des membres du groupe. Par la suite, les membres sont invités à présenter leurs réclamations auprès d’un administrateur qui leur remet la portion du recouvrement collectif à laquelle ils ont droit.
Toutefois, il est parfois impossible de présenter une preuve qui permet d’établir d’une façon suffisamment exacte le montant total des réclamations des membres. Dans ces cas, on doit procéder par réclamations individuelles. Ainsi, chaque membre du groupe est invité à produire sa réclamation et à établir la valeur des dommages qu’il a subi. Le processus de réclamations individuelles peut donc impliquer une multitude de petits procès au cours desquels les membres du groupe viennent un à un établir leur droit d’être indemnisés.
Toutefois, le recouvrement collectif est la norme et le processus de réclamations individuelles, l’exception.
IV. L’entente de règlement
Une entente de règlement peut survenir à tout moment avant qu’un jugement final n’intervienne sur l’action collective. Le cas échéant, des avis sont diffusés aux fins d’informer les membres du groupe des termes et conditions de l’entente envisagée.
Une date d’audition est également fixée. Lors de cette audition, les membres du groupe peuvent venir exprimer au tribunal leur opinion relativement à l’entente envisagée. Suite à cette audition et après avoir entendu les parties intéressées, le tribunal peut approuver ou rejeter l’entente. Ainsi, le tribunal joue un rôle de gardien des intérêts des membres du groupe.
Si, dans le cadre de l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le tribunal se satisfait des conditions de l’entente envisagée et l’approuve, l’entente lie dès lors la partie défenderesse et tous les membres qui ne se sont pas exclus du groupe. À l’inverse, si le tribunal rejette l’entente envisagée, le processus judiciaire habituellement suspendu dans le cadre des négociations est réenclenché.
V. Les avantages pour les membres du groupe
Le mode de rémunération des avocats en demande est un des avantages principaux de l’action collective aux yeux des membres. En effet, l’action collective permet de répartir sur les épaules de tous les membres la charge des honoraires des avocats qui agissent pour eux. Les honoraires des avocats des demandeurs sont généralement calculés sur une base à pourcentage et doivent impérativement être approuvés par le tribunal. En cas d’échec de l’action collective, les avocats sont généralement les seuls à essuyer une perte en ce que les membres du groupe ne sont pas mis à contribution.
De plus, alors que dans toute instance judiciaire, la partie qui succombe doit assumer les dépens encourus par la partie victorieuse et que la valeur des dépens est proportionnelle aux montants en litige, le législateur a prévu limiter les dépens en action collective à l’équivalent d’une action dont la valeur en litige serait au plus de 3 000 $.
Le législateur a également prévu la création d’un organisme, le Fonds d’aide aux actions collectives, qui vise à faciliter l’exercice des actions collectives en assurant une partie de leur financement, incluant certains déboursés encourus par les avocats en demande, comme c’est souvent le cas pour des expertises qui peuvent s’avérer très coûteuses. Lorsque l’action collective est victorieuse, il devient impératif de rembourser à même le recouvrement collectif les sommes avancées par le Fonds d’aide aux actions collectives. En cas d’échec toutefois, les sommes avancées par le Fonds d’aide aux actions collectives n’ont pas à être remboursées.
D’autre part, les membres d’un groupe impliqués dans une action collective n’ont généralement pas tous à se présenter au tribunal pour y témoigner. En fait, seul le témoignage d’une minorité d’entre eux peut s’avérer suffisant pour établir la preuve en demande. Ainsi, la très vaste majorité des membres concernés par l’action collective n’auront qu’à remplir un formulaire et à y annexer certains documents pour s’assurer de toucher les sommes auxquelles un éventuel jugement pourrait leur donner droit.
VI. Avantages pour l’administration de la justice
Lorsqu’un recouvrement collectif est ordonné, les membres du groupe qui ont subi un dommage sont invités à en réclamer la portion qui leur revient. Il est toutefois fréquent qu’un certain nombre de membres du groupe éligible au recouvrement collectif ne présente pas de réclamations. Dès lors, la fraction du recouvrement collectif qui n’a pas trouvé preneur (le « reliquat ») est distribuée aux fins de servir les intérêts du groupe. Par exemple, le reliquat d’une ordonnance de recouvrement collectif dans le cadre d’une action collective intentée au nom d’actionnaires pourra être distribué à des associations de protection d’épargnants.
La procédure de l’action collective permet ainsi de s’assurer que la partie défenderesse condamnée à des dommages ne puisse pas tirer avantage d’un faible taux de réclamation en récupérant le reliquat.
De plus, le nouveau rapport de force qui se crée entre les membres du groupe et la partie défenderesse, de même que l’incontournable médiatisation de pareils recours augmentent généralement les chances qu’une entente de règlement hors Cour survienne.